Notes pour une allocution devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense

Par l'honorable Jean-Pierre Plouffe, commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications

Le 12 juin 2017

L'allocution définitive fait foi

Monsieur le président, honorables sénateurs, je suis heureux de témoigner à nouveau devant ce comité, cette fois-ci au sujet du projet de loi C‑22. Je suis accompagné par Monsieur Bill Galbraith, le directeur exécutif de mon bureau.

Je me suis présenté devant le Comité permanent de la Chambre des communes, l'automne dernier, au sujet de ce projet de loi. Des modifications ont été apportées au projet de loi. Je ne vais pas répéter tout ce que j'ai dit auparavant; je vais plutôt parler de certaines des modifications, mettre l'accent sur des points nouveaux et répéter ce qui, selon moi, vaut la peine de l'être.

D'abord, je peux dire que je suis heureux de l'existence de ce projet de loi, de même que de l'engagement accru des parlementaires à l'égard de la reddition de compte en matière de sécurité nationale que représente le projet de loi. Je serai également heureux d'avoir l'occasion de dialoguer plus étroitement avec les parlementaires dans le contexte d'une relation complémentaire, qui évite les chevauchements inutiles, tel qu'il est stipulé dans le projet de loi.

Je pense que le comité parlementaire, qui a accès à des renseignements classifiés et qui a le pouvoir d'examiner, avec des qualifications particulières, toute activité d'un organisme ou d'un ministère ayant des responsabilités à l'égard de la sécurité nationale, procurera, en collaboration avec les organismes d'examen existants, une fondation solide pour un cadre de reddition de compte exhaustif concernant les activités liées à la sécurité nationale.

Ce comité comblera un vide. Son mandat étendu, tel qu'il est établi dans le projet de loi, lui permettra de poser un regard stratégique et étendu sur toutes les activités gouvernementales liées à la sécurité nationale. Le comité aura la possibilité de suivre l'information dans les agences et les ministères. Ce pouvoir devrait aider considérablement à établir le cadre de reddition de compte exhaustif souhaité. Bien entendu, les responsabilités du comité continueront d'être définies pendant que le comité s'oriente, ce qui se reflète dans la disposition d'examen quinquennal.

Ensemble, nous devons également, le Comité et les organismes d'examen existants, nous efforcer d'être le plus transparents possible, afin de permettre au Parlement et au public d'être mieux informés sur la conduite des activités liées à la sécurité nationale, ainsi que sur la façon dont les agences et les ministères sont tenus de rendre des comptes.

Ce sera un sujet de discussion pendant que nous élaborons la relation de travail avec les membres du comité. La transparence aide à établir et à renforcer la confiance du public, qui veut savoir si les organismes chargés de protéger le Canada, les Canadiennes et les Canadiens le font de façon efficace, dans les limites de leur mandat respectif, de même que dans le respect des libertés et de la vie privée. C'est là la pierre angulaire de mon approche en tant que commissaire.

La relation de travail entre le comité et son secrétariat, d'une part, et entre le comité et les organismes d'examen existants, d'autre part, nécessitera dès le départ des efforts soutenus. Le projet de loi contient des paramètres généraux concernant cette relation, concernant la nécessité d'éviter les chevauchements inutiles (article 9) et concernant l'échange de renseignements (articles 22 et 23).

Compte tenu de cette orientation générale, il nous appartiendra à tous de travailler fort, en particulier au début, afin de faire en sorte que nos rôles se complètent et que nous ne répétions pas le travail d'un autre, dans le but d'utiliser de la manière la plus efficace et la plus rentable possible nos ressources respectives. Toutefois, je ne dis pas que le projet de loi contient une orientation détaillée. Il vaut mieux que l'expérience et l'intérêt commun façonnent la relation.

Nous avons cependant réfléchi à la façon d'établir une relation productive. Brièvement, voici trois exemples :

L'un des aspects définis de la relation entre le comité et les organismes d'examen est l'échange de renseignements, qui est décrit aux articles 22 et 23 du projet de loi. Chacune des deux parties, soit le comité et les organismes d'examen, peut fournir des renseignements liés à la réalisation du mandat de l'autre partie.

La structuration de ces échanges de renseignements facilitera la définition des rôles de chacun, renforcera la complémentarité et aidera à éviter les chevauchements. Selon moi, ces échanges favorisent et renforcent la reddition de compte générale.

Il y a eu beaucoup de discussions sur le type de renseignements auxquels le comité parlementaire aura accès.

Nous pensons plus particulièrement à l'alinéa 8(1)b), ainsi qu'aux articles 14 et 16. En ce qui me concerne, je suis d'avis que les limites imposées par l'alinéa 8(1)b) et le paragraphe 8(2) semblent raisonnables. C'est-à-dire qu'un ministre peut refuser de fournir des renseignements sur les opérations en cours qui, selon lui, portent atteinte à la sécurité nationale, mais qu'il doit fournir les motifs de son refus au comité.

Combien de fois serons-nous témoins d'un tel refus? L'expérience nous le dira. Toutefois, mon expérience me permet de dire qu'il arrive rarement que les inquiétudes que nous avons se matérialisent dans la mesure où nous l'avions prévu au début. Je m'attends à ce que les ministres compétents aient rarement recours à ce pouvoir.

L'une des modifications qui a été apportée au projet de loi pendant son examen par la Chambre des communes a été la diminution des limites ou des exceptions relativement aux renseignements auxquels le comité parlementaire pourrait avoir accès.

L'article 14 conserve 4 des 7 exceptions qu'il contenait auparavant. Ces 4 exceptions me semblent raisonnables, si l'on tient compte de l'objet, du régime juridique et du contexte d'ensemble du projet de loi.

Ces commentaires s'appliqueraient également à l'article 16, dont l'objet est le refus de fournir des « renseignements opérationnels spéciaux » qui portent atteinte à la sécurité nationale. Encore une fois, le ministre doit fournir les motifs de son refus, et si les renseignements sont liés au CST, au SCRS ou à la GRC, il doit également fournir les motifs de son refus à l'organisme d'examen pertinent, c'est-à-dire à l'un de ceux qui témoignent devant vous aujourd'hui.

Il y a également eu un débat concernant la composition du comité parlementaire, et certains ont suggéré d'accroître le nombre de sénateurs. Cette suggestion semble raisonnable, si l'on tient compte du fait que les mandats des sénateurs sont plus longs. Effectivement, les sénateurs ont la possibilité d'accumuler des connaissances et de développer une expertise à long terme, ce qui renforce la capacité de poser des questions plus précises aux agences et aux ministères. La suggestion a aussi l'avantage d'assurer une continuité et la préservation de la mémoire institutionnelle. Le secrétariat est aussi appelé à jouer un rôle important à cet égard.

J'attends avec impatience l'opportunité, de travailler avec le comité parlementaire lorsque ce dernier sera une réalité.  

Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.

Date de modification :