Message du commissaire
Alors que mon deuxième mandat touche à sa fin, je fais le bilan d'une année bien remplie et satisfaisante. J'ai le privilège d'être le commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications en cette période cruciale où le gouvernement s'emploie à réviser le cadre de reddition de comptes en matière de sécurité nationale.
Premièrement, le projet de loi C-22 a constitué le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. Au moment où ce projet de loi a reçu la sanction royale en juin 2017, le projet de loi C-59 a été déposé, prévoyant l'octroi de nouveaux pouvoirs aux organismes de sécurité et de renseignement afin de leur permettre de contrer une menace en évolution ainsi que de protéger le Canada et les Canadiens tout en élargissant la surveillance de façon générale. Nous tous qui œuvrons dans le domaine de l'examen et sommes touchés par cette loi et ce projet de loi devons nous efforcer de veiller à ce que ceux-ci renforcent véritablement la reddition de comptes des organismes de sécurité et de renseignement du Canada. Une dimension inhérente à cette reddition de comptes consistera à s'assurer que nous continuons également à faire preuve de la plus grande transparence possible, afin que le public comprenne mieux de quelle façon ces organismes sont tenus de rendre des comptes, alors qu'ils doivent en grande partie mener leurs activités en secret, de même que le degré de rigueur qui est exercé à cet égard. De par leur étendue, les changements en cours peuvent sembler intimidants toutefois, l'adoption d'une démarche stable et concertée pendant la période initiale nous aidera à atteindre les objectifs visés, qui seront ultimement déterminés par le Parlement.
Le projet de loi C-59 est complexe et d'une très grande portée. Il propose d'apporter aux lois, aux activités et aux mécanismes de reddition de comptes en matière de sécurité nationale les modifications les plus importantes depuis que la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité a été adoptée il y a presque trente-cinq ans, dans le but de créer le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et le poste d'inspecteur général. Le projet de loi C-59 vise à établir trois nouvelles lois et à modifier cinq lois existantes. Mon rôle actuel consistant à examiner les activités antérieures du Centre de la sécurité des télécommunications (CST) sera assumé exclusivement par un nouvel organisme d'examen, soit l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, lequel sera chargé d'examiner toute activité liée à la sécurité nationale menée par tout ministère ou organisme gouvernemental. Ce projet de loi prévoit la création d'une autre loi, à savoir la Loi sur le commissaire au renseignement, en vertu de laquelle mon bureau effectuera la transition vers un nouveau rôle quasi judiciaire. Je participerai au processus décisionnel en examinant les autorisations ministérielles concernant certaines activités du CST et du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS). Si je suis convaincu, au terme de mon examen, que les autorisations signées par le ministre sont raisonnables, j'aurai le pouvoir, à titre de commissaire au renseignement, de les approuver. Ce n'est qu'ensuite que les activités visées pourront être exécutées.
Je surveille avec grand intérêt le cheminement du projet de loi au Parlement. Dans la mesure du possible, je veux m'assurer que le projet de loi ne recrée pas les problèmes qui ont hanté la partie V.1 de la Loi sur la défense nationale. Adoptée en 2001, la partie V.1 comportait des ambiguïtés qui, malgré les recommandations formulées à maintes reprises par mes prédécesseurs et moi-même, n'avaient jamais été traitées avant aujourd'hui, c'est-à-dire dans le cadre du projet de loi C-59. Cependant, ce projet de loi renferme des ambiguïtés en soi. À cet effet, j'ai présenté plusieurs observations au Comité permanent de la sécurité publique et nationale (SECU) de la Chambre des communes qui se penchait sur le projet de loi C-59. J'ai présenté des propositions de modifications visant à assurer la clarté et à éviter l'ambiguïté. Les autres modifications que j'ai proposées permettraient, à mon avis, d'ajouter un certain niveau de souplesse dans le but d'accroître l'efficience du processus d'examen et d'approbation, par le commissaire au renseignement, de certaines autorisations ministérielles pour le CST et le SCRS.
Le Canada n'est pas le seul pays à apporter des changements importants à ses pouvoirs et à ses mécanismes de reddition de comptes en matière de sécurité nationale. D'autres pays ont aussi répondu à la demande de nouveaux outils pour lutter contre les menaces en constante évolution tout en renforçant la reddition de comptes. Le solide partenariat entre les organismes de renseignement au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande (la Collectivité des cinq) a ouvert la voie à une tribune permettant aux représentants des organismes d'examen et de surveillance de ces pays d'étudier des questions et des préoccupations communes ainsi que d'échanger des pratiques exemplaires. À la fin de 2016, mon collègue, le président du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, et moi-même avons convenu, avec nos homologues de ces pays, de mettre sur pied le Five Eyes Intelligence Oversight and Review Council (conseil de surveillance et d'examen des activités de renseignement de la Collectivité des cinq). Le Canada a accueilli la première réunion en personne du conseil, laquelle s'est tenue dans mes bureaux en octobre 2017. Le commissaire au renseignement continuerait de participer aux activités de ce conseil.
Le conseil ne représente qu'une partie – mais une partie importante tout de même – des efforts visant à améliorer les échanges avec les organismes d'examen et de surveillance d'autres pays. Les discussions de ce conseil peuvent contribuer à l'efficacité du travail important que les organismes de renseignement accomplissent tout en veillant à ce que ce travail soit effectué dans les limites des autorisations légales, y compris dans le respect des droits à la vie privée dans nos pays respectifs.
Avant de conclure, je tiens à féliciter Mme Greta Bossenmaier pour sa nomination à titre de conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre. Je suis reconnaissant du professionnalisme, de la franchise et de la collaboration dont elle a fait preuve dans le cadre de notre relation de travail alors qu'elle agissait comme chef du CST.
Enfin, la dernière année a été mouvementée, et j'aimerais terminer en félicitant les membres de mon personnel pour les efforts extraordinaires et soutenus qu'ils ont déployés en évaluant le projet de loi C-59 et en veillant à ce que notre contribution soit et demeure positive et constructive. Ils ont en outre amorcé avec diligence les préparatifs en vue de la transition vers un nouveau rôle de surveillance unique au Canada et anticipé les répercussions de cette transition sur les services internes de mon bureau et les nombreuses responsabilités supplémentaires qui en découlent. Enfin, ils ont garanti un dialogue constructif avec le CST et le SCRS relativement au nouveau rôle proposé du commissaire au renseignement tout en assumant les responsabilités courantes qui consistent à examiner les activités du CST pour vérifier qu'elles sont conformes à la loi et qu'elles protègent la vie privée des Canadiens, jusqu'à ce que le projet de loi C-59 soit adopté.
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