Le réseau des responsables de l'examen
La première réunion internationale des inspecteurs généraux des activités de renseignement et de sécurité a été tenue à Canberra (Australie), en novembre 1997. Les responsables de l'examen des activités de la totalité ou de certaines parties de la communauté de la sécurité et du renseignement de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni, des États-Unis, de l'Afrique du Sud et du Canada y étaient présents. Les délégués sud-africains ont été chaleureusement accueillis compte tenu du fait que les institutions nationales de leur pays, en particulier les organismes de sécurité et de renseignement, sont en transition par suite de la fin de l'apartheid.
Cette réunion avait été convoquée par l'ancien inspecteur général de l'Australie pour souligner le dixième anniversaire de l'institution de sa charge. Les participants ont salué l'occasion qu'elle leur a fournie d'échanger des renseignements et des idées, de discuter des tendances et de comparer des modèles d'examen et de surveillance efficaces.
Les mandats et les formules d'organisation des bureaux des inspecteurs généraux représentés à la réunion se sont révélés extrêmement variés. Certains, comme ceux de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande et l'inspecteur général du Service canadien du renseignement de sécurité (scrs), ont un mandat prévu par la loi. D'autres sont indépendants des organismes qu'ils surveillent ou, au contraire, en font partie. Aux États-Unis, les mandats des inspecteurs généraux passent par toute la gamme de ces possibilités, et il ne semble pas exister de règles absolues touchant l'étendue de leurs responsabilités ni le degré de leur indépendance par rapport à l'organisme dont ils examinent les activités.
L'éventail des mécanismes d'examen et de surveillance parlementaires possibles s'est également révélé intéressant. Parmi les représentants du modèle d'examen parlementaire figuraient des membres du comité parlementaire du renseignement et de la sécurité du Royaume-Uni, désigné comme un comité de parlementaires plutôt que comme un comité réglementaire officiel du Parlement; le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité du Canada, qui se compose de trois à cinq membres du Conseil privé nommés par le gouvernement pour passer en revue les activités du scrs; et des membres du comité mixte permanent du renseignement, qui réunit des parlementaires d'Afrique du Sud, où le gouvernement est en train de définir un modèle en vue de la surveillance des activités de renseignement. Les participants ont en outre rencontré le comité mixte parlementaire sur l'organisme de renseignement de sécurité de l'Australie (asio) dans le cadre du programme de la réunion.
Tout en comportant des points communs manifestes, les fonctions d'examen ou de surveillance confiées aux participants présentaient une grande variété. Elles comprenaient des responsabilités comme les suivantes :
- surveiller la légalité des activités de l'organisme;
- protéger les droits des citoyens;
- faire enquête sur les incidents et les activités opérationnelles controversés par le public;
- faire enquête sur les plaintes en provenance de diverses sources;
- faire enquête sur les questions de pratiques en matière de sécurité, d'accès à l'information et de protection de la vie privée;
- surveiller les activités et faire rapport de leurs constatations à l'organe législatif ou exécutif du gouvernement;
- rassurer le ministre ou le membre du Cabinet responsable.
Certains participants avaient des responsabilités aussi diverses que faire enquête sur l'escroquerie, le gaspillage et l'abus des ressources et découvrir des activités criminelles.
Les mécanismes d'examen et de surveillance tendent à être structurés en fonction de la répartition des rôles, des mandats et des pouvoirs entre les organismes parlementaires et non parlementaires, ou entre les organes exécutif et législatif de chaque pays. Cette répartition est influencée par divers facteurs, comme :
- la présence ou l'absence d'une loi habilitante visant les organismes faisant l'objet de l'examen;
- Le choix du pays de confier la responsabilité d'examiner et de surveiller les organismes de sécurité et de renseignement à un organisme parlementaire plutôt que non parlementaire (ou à l'organe exécutif plutôt que législatif);
- l'existence d'autres organismes établis par des lois (au Canada, par exemple, les commissaires à l'information et à la vie privée et le vérificateur général).
Il était manifeste que, dans chaque pays représenté, on avait décidé du meilleur moyen à prendre pour assurer un examen ou une surveillance efficace en puisant dans l'ensemble des compétences constituées par les élus, les personnes nommées par le Parlement et les fonctionnaires.
De façon générale, les participants ont été d'accord pour dire que l'examen et la surveillance avaient évolué au cours des années et continueraient de changer, en particulier dans les pays qui n'ont adopté une loi habilitante que tout dernièrement. Fait à noter, ils ont convenu que l'existence même de mécanismes d'examen et de surveillance tend à transformer la dynamique des organismes de sécurité et de renseignement, et les amène à évaluer et, au besoin, à modifier leur façon de faire les choses. Avec le temps, ces organismes ont commencé à se rendre compte des avantages inhérents à l'examen et à la surveillance, notamment la capacité de détecter des problèmes internes et d'y remédier.
Malgré la différence des mandats d'examen et de surveillance des participants, un certain nombre de questions et de thèmes communs se sont dégagés. Par exemple, les demandes croissantes visant une transparence et une responsabilisation accrues des gouvernements sont une toile de fond commune aux activités de tous les participants.
L'indépendance et l'objectivité ont été désignées comme essentielles au succès du travail d'examen. Dans l'ensemble, les relations entre les organismes d'examen ou de surveillance et les organismes surveillés ont été décrites comme conformes aux règles, correctes et généralement cordiales. Tous les participants ont convenu qu'ils sont constamment sur la corde raide en raison du besoin de maintenir leur indépendance et de gagner la confiance non seulement de l'organisme surveillé mais aussi du public. Ils ont en outre reconnu la difficulté qu'ils doivent surmonter pour garder la confiance du public dans les cas où ils ne trouvent rien à redire aux activités des organismes soumis à leur surveillance ou à leur examen. Ils ont cependant convenu de façon générale que le temps et l'expérience aident à atteindre un juste équilibre en la matière.
La réunion de Canberra a ouvert la voie à d'autres discussions au cours de l'année. Ainsi, en mars, j'ai eu l'occasion d'examiner plus à fond certains de ces thèmes lorsque les membres du comité parlementaire du renseignement et de la sécurité du Royaume-Uni sont venus à Ottawa dans le cadre de leur programme de consultations en Amérique du Nord. En avril, mon personnel a eu des entretiens fructueux avec certains de mes homologues américains à Washington (D.C.).
En résumé, il est ressorti de ces entretiens que les mécanismes d'examen et de surveillance sont des éléments relativement nouveaux de la communauté de la sécurité et du renseignement partout dans le monde, et qu'ils continuent d'évoluer. Ils jouent un rôle important pour répondre aux demandes visant une transparence et une responsabilisation accrues des gouvernements. Leur existence même encourage les organismes de sécurité et de renseignement à évaluer et, au besoin, à modifier leur façon de faire les choses.
Je suis d'avis que notre petit groupe de surveillants indépendants peut continuer à retirer des avantages importants de l'échange de connaissances avec leurs homologues sur ces sujets.
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